Carte du parcours

vendredi 17 juillet 2015

Chine partie 4 : le nord du Sichuan, contre vents et flocons




Du 19 mai au 29 mai 2015

Cette nuit, il a neigé sur Litang.
La journée débute par un petit col couvert de neige, et caché dans les nuages. Nous arrivons au sommet en même temps que Michael, un motard suisse rencontré à Litang (pour la petite histoire, Michael va tenter de rentrer au Tibet déguisé en tibétain, sans se faire pincer par les autorités chinoises... on croise les doigts pour que tout se passe bien pour lui!)
Le temps de faire une petite photo ensemble, les nuages se lèvent et le soleil illumine les montagnes autour de nous.

Pendant 10km, nous sommes sur la route qui mène de Chengdu à Lhassa : on n'a jamais croisé autant de cyclo-voyageurs! Il y a plus de vélos que de voitures, un rêve! Il s'agit en fait de cyclo-pélerins chinois, qui partent au Tibet dans le cadre de voyages organisés... à vélo. Comme quoi, ils ne sont pas tous adeptes des voyages en car!


Nous arrivons sur une route déserte qui traverse une magnifique vallée verte et brune, bordée de sommets encore enneigés. Seuls quelques campements nomades sont installés ici, avec leurs yaks et quelques chevaux. Des vautours se laissent porter par les vents ascendants. Des centaines de grosses marmottes détalent en nous voyant. Au bout de la vallée, quelques lacets mènent au col. On se fait attraper par une forte averse de grêlons; mais ça ne dure pas, et bien vite le soleil reprend sa place. Alors, la route et la montagne se mettent à fumer. Ils sont beaux, les troupeaux, au milieu de ces nuages de vapeur.
Deux hommes à motos rejoignent leurs campements

Dans les lacets qui se trouvent derrière le col, nous surprenons un groupe de vautours occupés à se disputer la carcasse d'un yak. Puis, c'est parti pour une longue descente...  de 45km! Arrivés dans la vallée suivante, nous la remontons pendant 200km. C'est une vallée très étroite qui devient même une gorge, de temps à autre. Lorsqu'elle s'élargit un peu, on débouche sur un village et quelques champs. Pas facile de trouver des endroits tranquilles pour camper...!
 
Sur les montagnes autour des villages, 
il y a des centaines de drapeaux qui forment des motifs géométriques
Les fenêtres tibétaines, on ne s'en lasse pas!
Les toilettes suspendues au premier étage, pratique
Petit dèj' de sportif

Nous faisons la connaissance d'une vieille dame tibétaine. Elle nous offre de l'eau chaude, un petit pain et du zamba : une préparation typiquement tibétaine. Elle montre à Marion comment en préparer : il faut verser un peu de thé chaud sur de la farine d'orge, malaxer, ajouter du beurre de yak et un peu de sucre. C'est pas mauvais! Par contre, l'eau ne devait pas être propre... et Marion est malade la nuit suivante et le lendemain.
Dans le petit bol, c'est du zamba
200 km dans cette gorge, sur une route déserte
Ponctuée de petits villages et des stupas pour nous distraire!
Le socle en terre, le dernier étage en bois
Un tri-moulin à eau à prières
Un pont avec des piles hydrodynamiques, pas cons les anciens!

Nous rencontrons aussi un jeune moine qui vient nous rendre visite un soir, alors que nous sommes en train d'arranger la tente et de cuisiner. Il est complètement fan de notre installation, et surtout de notre réchaud! Il reste un long moment avec nous, à nous observer, avec une curiosité bienveillante, qui n'est pas vraiment gênante.

Une petite visite tout en sourires
Ce tibétain se rend comme nous à Ganze. Il a trouvé des "champignons chenilles" 
et va les vendre en ville. Ils se vendent cher car sont très appréciés
 pour leurs vertus médicinales et aphrodisiaques.
À Ganze , nous passons une nuit dans une petite et sympathique guesthouse familiale, avec une très belle vue sur les montagnes. C'est une petite ville typiquement tibétaine, avec de bons restaus qui servent des soupes de "djao dzeu" (raviolis vapeur à la viande), un monastère, un petit marché et une quantité de magasins de vêtements pour moines.

Sympa la vue depuis notre chambre d'hôtel!
Une boutique de vêtements pour moines.
Une vue typique d'un village de la région : en arrière-plan, le monastère.

À Manigango il fait moche. Ça tombe bien, on laisse nos vélos là pendant un jour et demi, car on part visiter le monastère de Dege. On confie nos vélos et nos sacs dans un hôtel. Pas de chance, le temps de manger une soupe de djao dzeu, on vient de rater le minivan pour Dege! On décide alors de faire du camion-stop. Par chance, le premier camion accepte de nous embarquer : c'est parti pour 6h de route sur une piste, dans les montagnes enneigées! Le chauffeur est super sympa, on communique avec lui par signes, principalement.  Il s'appelle Hun Chen Io Bu (ou quelque chose comme ça).

Le monastère de Dege n'est pas un monastère comme les autres : c'est aussi une importante imprimerie de textes religieux bouddhistes. Nous pouvons la visiter, et observer les hommes au travail. Les textes sont toujours imprimés de manière traditionnelle, sans machine ni même électricité. Deux hommes se placent face à face : l'un des deux maintient la matrice en bois où est gravé le texte. Il l'enduit d'encre à l'aide d'une brosse. L'autre homme saisit un parchemin vierge et le place sur la matrice. À l'aide d'un rouleau en tissu, le papier est comprimé contre la matrice pour être imprimé. Ça parait simple, mais tout ça est exécuté à une vitesse impressionnante. Chaque jour, 2500 pages seraient imprimées ici, destinées aux monastères du Tibet entier.
L'imprimerie est également une grande bibliothèque contenant environ 217.000 textes tibétains, gravés dans le bois.
Un grand merci à Seb et Delphine, cyclos suisses rencontrés au Cambodge, de nous avoir indiqué l'endroit!

Dans le camion avec Hun Chen Io Bu
On passe un col enneigé sur une piste défoncée. 
Et là, pour une fois, on ne regrette pas les vélos!
Embouteillage de camions dans un virage
La bibliothèque de textes gravés dans le monastère
Les imprimeurs travaillent à toute allure, par deux
Sur le toit du monastère
Ils font le tour du monastère, chapelet à la main, en récitant des prières
Lui, il préfère méditer depuis son canapé
Notre trajet de retour à Manigango, en camion-stop également!
Il pleut toujours à Manigango. On se dit qu'on pourrait aller à l'hôtel ce soir...  on prend une chambre dans le seul établissement autorisé aux étrangers. Mais, rapidement, on se rend compte qu'on n’est pas seuls : de gros rats viennent nous rendre visite, et ils en profitent pour grignoter nos galettes de pain. Piqués au vifs, on exige de se faire rembourser, et on s'en va, fiers comme des papes, sous la pluie à 23h. Mais lorsqu'on traverse le village et qu'on se fait courser par des chiens dans l'obscurité, on fait a moins fière allure!
Heureusement, à 2km de là, on trouve, à la lampe torche, un endroit tranquille pour planter la tente. Vive la tente. C'est notre petit chez-nous et il n'y a pas de rat, ici, non mais!
Tente 5 étoiles !
Les quatre jours suivants, nous pédalons toujours en direction du nord, à travers les hauts cols du Sichuan. Les paysages sont toujours aussi grandioses. Les photos parleront mieux que nous...

Au sommet, on croise un chien voyageur qui passe le col avec nous
Et encore un...
Dans les montées et dans les descentes, jusqu'à la destination finale...

 Étienne a développé deux passions simultanées.
La première pour les vautours. Dès qu'il en voit un, il faut absolument qu'on s'arrête pour un shooting photo digne des plus grands mannequins. Et pourtant, les vautours sont loin d'être élégants!
Sa deuxième passion, c'est les cornes de yaks. Il y en a qui traînent dans les prés, au bord de la route. Mais le mieux, ce sont les carcasses de yaks avec lesquelles il faut se battre pour séparer la corne de l'os! Je vous dis pas le poids supplémentaire dans les sacoches...
Quand nous les surprenons pendant leur repas, les vautours se sauvent 
maladroitement et nous regardent d'un mauvais œil...!
Etienne qui essaye de séparer la corne du cartilage...

Une chose nous frappe, depuis quelques jours : c'est la première fois du voyage que nous voyons autant d'animaux sauvages. Il y avait des singes en Malaisie, des oiseaux en Thaïlande... mais ici, nous voyons des marmottes, des aigles, des vautours, de grosses souris, et des renards.

Saurez-vous les reconnaître?
 Le canard sauvage, le vautour, le coucou, la buse et l'aigle
Un renard

Un soir, nous plantons la tente à proximité d'un campement de nomades. Nous recevons la visite d'un jeune homme. Il a traversé le ruisseau glacé avec ses baskets, et il n'a même pas froid! Il aime bien nos biscuits et nos photos de voyage. Il nous parle du dalaï-lama qui est en exil, et il nous raconte qu'il possède 101 yaks. Le lendemain matin, c'est une femme portant un bébé qui traverse le ruisseau pour partager notre petit-déjeuner. Ces rencontres sont à chaque fois des cadeaux, des moments tout simples mais qu'on n'oublie pas.


Pendant ces derniers jours dans le Sichuan, nous sommes, pour la première fois de notre voyage, attaqués par des chiens. Ce sont d'énormes chiens noirs, qui ressemblent à des ours. Dans chaque village, il y en a au moins une bonne vingtaine : certains sont attachés, et d'autres non... Dès qu'ils nous entendent, c'est parti, ils aboient d'un air méchant. Ceux qui le peuvent courent vers nous à toute vitesse, et nous avons juste le temps de nous baisser pour ramasser des cailloux. Certains chiens s'arrêtent à quelques mètres et s'éloignent sous nos hurlements et sous les cailloux. Mais il y en a quelques-uns qui nous ont bien fait peur. Une fois, un gros chien ne s'est pas arrêté devant Étienne : il a foncé dans le vélo et a l'a fait tomber. Une autre fois, deux chiens très agressifs se tenaient à un mètre de Marion. Ils bavaient, grognaient, montraient les dents, et faisaient mine de mordre à la première occasion.  Marion était bloquée là, à jeter des cailloux et à crier, l'angoisse montait. Heureusement, un camion est apparu au bout de la route. Le chauffeur s'est rendu compte de la situation, et il a manœuvré pour venir se placer entre les chiens et Marion, qui a pu se sauver. Ouf! Merci chauffeur!

Les yaks sont plus sympas que les chiens...
Un petit mot sur les moines tibétains. Ici comme ailleurs, nous sommes souvent choqués par la richesse qui émane du monde religieux. Les monastères sont clinquants, en travaux, à la taille souvent démesurée. Les moines semblent oisifs. Ils font des tours à motos, et les jeunes jouent parfois aux cons sur la route pour s'amuser. Ils portent des lunettes de soleil, possèdent des tablettes et des smartphones, se prennent eux-mêmes en photo. On ne croise presque jamais de voiture ici : les Tibétains se déplacent en moto. Mais lorsqu'une 4x4 apparaît sur la route, elle est presque systématiquement conduite par des moines. L'autre jour, on voit même un moine qui paye un homme pour laver sa voiture... Et après, ils nous demandent de faire des dons pour notre karma...!

Un monastère tout neuf, immense
Les monastères sont entourés de murs. Parfois, tout le village se trouve à l'intérieur de cette enceinte.
Une nuit nous avons planté la tente au milieu d'une grande plaine. Il fait froid et venteux. Et à notre réveil, la tente est couverte de neige. Dur dur de sortir de son sac de couchage, ce matin-là!
La veille au soir
Au petit matin
Le petit dèj', on le prendra dans la tente!
L’Étienne qui voulait devenir aussi résistant que le Yak
Aujourd'hui est une grosse journée : nous roulons 50km sur une piste défoncée, pierreuse et gadouilleuse, pour atteindre un col (le dernier) à 4600m. Heureusement la neige s'arrête de tomber dès les premiers coups de pédale. Nous mettons huit bonnes heures pour arriver à bout de cette montée. Mais le beau temps ne se maintient pas, et en milieu de journée, la tempête de neige recommence. Pour se donner du courage, on se dit qu'on est des survivants. Mais les vrais héros, ce sont les yaks, impassibles, et les ouvriers de la piste, toujours de bonne humeur : ils nous lancent des "Tachidélé" en allumant une clope, alors que la neige nous fouette le visage et qu'on y voit pas à trois mètres!

La longue piste...

Nous voyons enfin le haut du col. Plus qu'un ou deux kilomètres. Marion est à bout de force et se décourage parfois. Un homme arrêté au bord de la route nous observe un moment, puis prend son élan, et se met à pousser le vélo de Marion pour l'aider à rattraper Étienne! Merci merci merci!!!

À 18h30, nous voilà arrivés en haut. Nous sommes à la frontière du Sichuan et du Qinghai, et le macadam refait son apparition. Un berger à cheval est en train de ramener ses yaks au campement situé un peu plus bas, côté Sichuan. Il vient nous saluer. Il est beau, sous la neige, sur son cheval... Il nous invite à venir manger et dormir au campement. Nous hésitons... mais l'idée de faire demi-tour ne nous plaît guère et la fatigue nous pousse à refuser . C'était peut-être une erreur.


Nous redescendons sous la pluie, et, à la nuit tombée, nous demandons l'hospitalité dans un monastère. Histoire de monter la tente dans un endroit sec. Nous voilà immédiatement entourés d'une horde d'enfants-moines très curieux, pour qui nous sommes l'attraction de la soirée! Nous les remercions pour le toit et la théière d'eau chaude.
Les ponts sont tous décorés de guirlandes et de cailloux peints
Oups... un monastère tombé de la falaise...
Arrivée à Yushu



Le lendemain matin, nous arrivons dans la ville de Yushu. Nous voilà arrivés à notre dernière étape, c'est la fin de notre itinéraire à travers le Yunnan et le Sichuan, c'est la fin du plateau tibétain.
À Yushu nous allons prendre un bus de nuit qui nous emmènera à 1000 kilomètres d'ici, au pied du plateau. C'est trop injuste, il profite de la descente à notre place!


1 commentaire:

Unknown a dit…

Coucou les amis,

Toujours aussi chouette à lire et regarder. Les photos sont magnifiques!

Plein de bisous!!