Du 28 juillet au 10 août 2015
Après un mois passé dans la région de Bishkek, nous voilà de nouveau sur
les routes! Nous repartons dans sud du Kirghizstan, dans la ville de Osh, où
nous étions déjà passés il y a deux mois. Mais cette fois-ci, nous ne passons
pas par la route principale du pays, mais nous nous enfonçons dans l'intérieur
des terres, sur les pistes caillouteuses... Heureusement, pour cette étape qui
ne s'annonce pas facile, nous sommes bien accompagnés : Tigrou, notre ami belge
qui nous a rejoints pour deux semaines, nous escorte jusque Osh. Et nous avons
également le plaisir de rouler avec Virgile pendant les quelques premiers
jours, jusqu'au lac Song Kul.
Le premier jour nous luttons contre le vent, mais nous sommes encore
pleins d'entrain. Nous atteignons un lac où nous décidons de camper. C'est
un soir un peu spécial, car c'est l'anniversaire d'Étienne. Tigrou a ramené
plein de bières et de chocolat de Belgique, et on en profite bien!
Le lendemain matin, nous apercevons un groupe de chameaux qui se promène
nonchalamment au bord du lac :
Après Kochkor nous quittons le
macadam, c'est parti pour la piste!!! Pendant une semaine, nous ne croiserons
plus beaucoup de villages ni de magasins.
Le début de la piste |
Notre caravane jusqu'au Song Kul |
Tigrou est très fier de sa T2 Quechua! |
Tigrou avait le sourire avant de dormir, mais pendant la nuit la gastronomie locale ne lui a pas réussi... |
Le lendemain matin, en traversant un village, nous sommes invités par
une femme parlant anglais à boire du Bozo (une boisson locale, fermentée et à base d'orge)
dans la yourte familiale. C'est une magnifique yourte traditionnelle. Le
grand'père, le "dedouchka", a lui-même construit la structure en
bois. La "babouchka" a cousu les pans de laine de mouton qui couvrent
les murs, et a tissé les bandes de tissu coloré qui les retiennent.
Le drapeau kirghize est présent dans toutes les yourtes! |
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La famille au complet |
C'est le vélo de tous les enfants d'ici! |
Dans la montée vers le lac Song Kul |
Après un premier col, nous arrivons au lac Song-Kul (3000m d'altitude),
dans la belle lumière du soir. Il y a plein de monde ici : un grand troupeau de
yaks, des centaines de moutons, des dizaines de chevaux. Quelques yourtes sont
posées, de loin en loin, dans les grandes plaines qui bordent le lac.
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Chacun exprime sa joie en haut du col, à sa façon! |
3600m. Enfin... on a essayé! |
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Arrivée au lac Song Kul! |
Les yourtes fument, il est temps de planter la tente |
Sitôt arrivés au lac, Marion et Tigrou changent de monture |
Le lendemain, on se rend dans une yourte pour demander à louer des
chevaux pour quelques heures. Rien de plus facile! Pour un prix dérisoire et
sans aucune mesure de précaution particulière, nous voilà en selle (de cheval
cette fois-ci). Étienne n'a jamais fait d'équitation, il n'est pas super à
l'aise...! Nous voulons nous approcher un peu du lac. Mais les chevaux
s'embourbent dans les marécages... On essaye de sortir de là, mais on ne sait
plus où se trouvent les zones plus solides. Les chevaux se fatiguent... quand
soudain, les chevaux de Tigrou et de Marion s'enfoncent les pattes dans la vase
jusqu'à mi-hauteur, se débattent, puis s'affalent au sol, épuisés. On s'en sort
pas trop mal, sauf Tigrou qui s'est coincé la main dans la selle et s'est cassé/foulé
un doigt... Heureusement, il est médecin : il se fabrique une attelle avec les
moyens du bord!
Nous chevauchons quelques heures dans les grandes étendues de collines
qui surplombent le lac. Le temps n'est pas avec nous, et la pluie se met à
tomber... nous rentrons frigorifiés, et profitons d'un bon thé chaud dans la
yourte avant de repartir.
"Moi, je préfère mon vélo! Il trébuche tout le temps ce canasson!" |
La crème de lait ultra-nourissante et bien réconfortante |
La yourte est tenue par deux frères. Le plus âgé nous fait comprendre
que le cheval noir (celui que montait Tigrou) est son cheval de compétition :
il joue au Kök-borü, un jeu très populaire au Kirghizstan et dans toute l'Asie
centrale en général. C'est un sport collectif qui regroupe de nombreux
cavaliers et... une carcasse de mouton. La carcasse de mouton, c'est le ballon!
Les cavaliers se battent pour l'attraper (le simple fait de soulever le mouton
demande une énorme force!), et le but est d'emporter le mouton dans une zone
déterminée. On reconnaît les joueurs de Kök-borü à leur poignet ultra-musclé!
Là, on se dit : Heureusement que le cheval de Tigrou ne s'est pas cassé
une patte dans la vase, on aurait passé un sale quart d'heure!!!
Virgile nous quitte, et retourne à Bishkek pour récupérer son visa
iranien. Après, il partira également dans les Pamirs, au Tadjikistan... on
espère bien le recroiser quelque part. Les jours suivants, nous roulons sur des
pistes en direction de l'est. Nous traversons de beaux paysages, et de belles
montagnes.
Un festival folklorique au bord du Song Kul |
Ceux-là, on les descend heureusement! |
Dans chaque village on trouve les mêmes clôtures et les mêmes pompes à eau |
Après le village d'Ak-Tal, on se perd dans des collines sablonneuses et
désertiques.
Le premier col est très beau, nous avons une magnifique vue sur les
montagnes couleur de terre. Mais c'est long... et nous n'atteignons le sommet
qu'à la tombée de la nuit. C'est un sommet-plateau composé de collines sur
lesquelles campent des yourtes et leurs troupeaux. Nous plantons la tente à
proximité de l'une d'elles.
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Ici, TOUTES les côtes sont à 12%... ou bien c'est qu'ils n'ont qu'un seul type de panneaux? |
Aussi efficace que le Kärcher! |
Une fumée blanche s'échappe de l'orifice situé au sommet de chaque
yourte : c'est le poêle qui chauffe la soupe. Pour faire du feu, les Kirghizes
utilisent des bouses séchées dont ils font des galettes avant de les brûler.
Notre tente étant située sous le vent, on a l'impression de se trouver dans une
étable!
Le berger à cheval, aidé de son chien, ramène les moutons dans l'enclos
en sifflant. Sa femme, fichu sur la tête, trait une vache devant la yourte. Étienne lui achète
une bouteille de lait tout chaud, tout juste sorti du pis... un délice.
La journée suivante est un peu dure : ça monte, ça descend, ça monte, à
la fin on ne sait plus très bien... on est un peu étourdis par le cahotement incessant
de nos vélos. La piste n'est pas bonne, il y a beaucoup de "tôle
ondulée" à éviter. Nous avons l'attention constamment focalisée sur l'état
du sol, et nous ne pouvons pas pleinement profiter des paysages qui nous
entourent... qui sont pourtant très jolis.
Avec les vibrations dues à la piste, on perd des vis! |
OH! Magnifique, le cheich ;-) |
Wesh', gros! |
Nos derniers kilomètres vers Kazarman |
En ce moment, c'est la récolte du foin |
La météo n'est pas à notre avantage : depuis le Song-Kul le ciel est
couvert, et il pleuviote parfois... Tigrou nous a ramené de la grisaille belge
dans ses bagages, ou quoi...? J
Toujours est-il que nous commençons doucement à nous lasser. Alors,
c'est décidé, nous allons monter dans un camion pour passer le dernier gros col,
car on n'est pas là pour souffrir non plus!
À Kazarman, une voiture promet de nous embarquer après la
pause-déjeuner, mais après une heure de retard, on finit par monter à bord d'un
camion qui part dans la bonne direction. Grosse erreur, on aurait dû continuer
d'attendre la voiture.
Ce fut notre pire rencontre au Kirghizstan... le chauffeur était de ceux qu'on insulte le plus quand on
les croise à vélo. Voici une petite liste de ses exploits :
- il nous trimballe pendant deux heures dans la ville avant de partir
- il charge une Lada dans le coffre, retenue par de simples petites cales en bois...
clouées au sol du camion! On n'est pas rassurés car les vélos se trouvent juste devant et la Lada bouge pendant tout le
trajet et il faut, par deux fois, la déplacer pour l'aligner aux cales.
- le chauffeur klaxonne dès qu'il voit quelque chose bouger : enfants, voitures,
vaches et chevaux, tout est bon pour pousser à fond sur le klaxon.
- il met la musique au volume maximum pendant les 5h de trajet.
- il roule comme un dingue sur les pistes défoncées et nos fesses décollent (pas de
ceintures ici).
- il manque d'écraser un motard : c'est un grand jeu ici. Lorsqu'une
moto ou qu'un vélo est en vue, il faut accélérer, se décaler, et faire mine de
l'écraser en frontal avant de dévier au dernier moment. Le camionneur est
hilare. Le motard, lui, il s'est réfugié dans le fossé...
- il passe sur un pont à moitié détruit au lieu de rouler dans le lit de la rivière.
- il embarque une dizaine d'ouvriers de la route dans son coffre.
Nous décidons d'abréger nos souffrances et celles de nos vélos en
débarquant à 35km de Jalal-Abad. Nos vélos sont abîmés : le porte-bagage
arrière de Tigrou est cassé, son pneu est crevé, et le cadre du vélo de Marion
est griffé. Nous sommes furieux et nous refusons de payer la totalité de
la somme. Le camionneur, lui, exige d'avoir plus que le prix convenu! Le ton
monte. Il a des gestes de violence, et attrape nos sacs pour les garder avec
lui... Nous finissons par lui payer le prix de départ, écœurés. Dans le noir,
nous réparons le pneu crevé pour pouvoir repartir. Mais après quelques coups de
pédales, le pneu crève de nouveau, Marion freine, Étienne lui fonce
dedans... on s'en sort avec un gros bleu, un garde-boue cassé...et le moral à zéro. Mais à ce moment-là, ce que nous ne savons pas, c'est que nous sommes
arrêtés devant la maison de la plus adorable famille kirghize qui soit. La
règle se confirme une fois de plus : à chaque moment de galère succède son
moment de joie!
C'est une maison entourée d'un grand jardin. Il y a des oies et leurs
petits, des pommiers, un grand ballot de paille, une toilette au fond. La "babouchka"
vit ici avec ses petits-enfants, un de
ses fils, et sa belle-fille. Tous ses autres enfants sont partis à Moscou pour
travailler (une de ses filles est journaliste, un de ses fils est électricien).
Le fils qui est resté est sourd-muet. Le 10 mars, il s'est marié, et sa jeune
femme (sourde-muette elle aussi) a emménagé. Ils ont l'air très heureux.
Nous plantons la tente dans le jardin, et nous sommes invités à manger
la soupe et boire du thé avec la famille. Le lendemain matin, c'est un petit
déjeuner de roi qui nous est offert : du pain fait maison, de la crème, du
sucre, du thé... et du miel que nous avions amené. La communication avec cette famille
est finalement assez facile : ils sont habitués au langage des signes, et nous,
c'est notre principal moyen de nous exprimer!
Nous repartons sur la route, enfin macadamisée, la joie au cœur et
l'estomac plein, avec 5 kg de pommes dans les sacoches.
À Jalal-Abad, nous faisons une pause pic-nique dans le parc. Il est
marrant ce parc, il est truffé de merveilles qui datent de l'URSS : des statues
et des vieux manèges de fête foraine, à la peinture un peu écaillée, et qui
grincent comme pas possible!
À Ozgon, Tigrou et Étienne
visitent le minaret et le mausolée: une merveille de détails architecturaux.
Dans la vallée de Fergana, chaque village produit son propre riz |
Alors que nous prenons un copieux repas, allongés sur les banquettes surélevées
d'un petit restaurant, un homme qui parle anglais nous accoste. Il répond enfin
à une question que l'on se posait depuis un moment : pourquoi les Kirghizes
parlent-ils un peu d'allemand (en plus du russe)? Et bien c'est tout simple :
l'allemand était la langue étrangère enseignée dans l'ex-URSS.
Ce monsieur nous explique qu'il vit avec une pension de 100€ par mois. Il porte le chapeau traditionnel kirghize. |
Un dernier bout de vélo, à travers la vallée de Fergana, et nous voilà
de retour à Osh! Nous retrouvons la guesthouse que nous avions quittée presque
deux mois plus tôt. Nous retrouvons également Claude Marthaler, et même Angie
(notre hôte à Bishkek, qui est venue passer des vacances à Osh!). Nous visitons
le bazar de Osh, et Étienne et Tigrou grimpe sur la petite montagne de
Sulaiman.
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Arrangement soviétique |
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Le Kurut : des boulettes de fromage salé |
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Au bazar de Osh, section récup' en tout genre |
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Le four à pain traditionnel, et son boulanger |
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Selfie à la chinoise |
Encore et toujours... le type au menton pointu...???? |
Tigrou s'est maintenant envolé pour l'Europe... dans quelques heures il
sera déjà arrivé. Nous, ce sera dans quelques mois! Merci Tig' pour ces supers
moments passés avec toi!
Après quelques jours de repos, nous voilà à la veille de notre départ
pour la mythique route des Pamirs, au Tadjikistan. Une route très courue par
les cyclovoyageurs... On croise les doigts pour la météo, et on est tout
excités!
2 commentaires:
Trop top :o) comme toujours,
J'espère que vous allez bien !
Coucou de Schaerbeek !
Toujours un plaisir de vous suivre dans vos aventures. Nous vous espérons en pleine forme.
Nous attendons la suite au Tadjikistan.
Bisous de Brigitte et Jean-Marie
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