Du 16 au 27 septembre 2015
On nous avait prévenus, ça n'a pas loupé : le passage de la frontière
ouzbèke est une véritable épreuve! Après quelques premières vérifications de
passeports, un policier ouzbek souhaite contrôler le contenu de notre appareil
photo. Il est très intéressé, et nous
pose beaucoup de questions en russe ("cette femme est-elle
tadjike?", "Ce garçon noir,
qu'est-ce que c'est?", "cette maison, c'est où?"). Une fois les
passeports tamponnés, nous passons à la fouille. Nous sommes séparés, et les douaniers
nous demandent d'étaler le contenu de nos sacoches. Ils sont à la recherche de
drogues, de médicaments contenant de la codéine, ou de porno. Le chef s'occupe de vérifier les mémoires de nos
appareils photo, du disque dur, de l'ordinateur... Nous réalisons alors que le
premier policier avait simplement voulu satisfaire sa propre curiosité. Heureusement,
on nous avait prévenus que la fouille pouvait être très longue, et nous avions
caché la plupart des fichiers informatiques. Et ça marche, le policier n'y voit
que du feu, il claque rapidement le capot de l'ordinateur, visiblement
mécontent! Nous quittons la frontière après 1h30 de fouille... et il fait déjà
nuit. Mais bon, passons, et partons à la recherche de notre premier bivouac ouzbek!
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Première nuit en Ouzbékistan : chacun dort dans son sillon |
Premier objectif en Ouzbékistan : la ville de Samarcande, une étape clé
sur la route de la soie. Il nous faudra cinq jours pour y arriver.
Les premiers paysages ouzbeks sont ceux des champs de coton : il y en a
partout. Des buissons aux feuilles sombres, avec, au bout de chaque branche, un
petit duvet de coton tout propre. C'est la saison de la récolte, et les champs
sont remplis de femmes portant des fichus colorés sur la tête, et un grand drap
dans le dos, rempli de "l'or blanc". L'Ouzbékistan est un des
principaux producteurs mondiaux de coton, depuis l'Union soviétique.
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La récolte du coton |
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Nous sommes toujours en Asie Centrale : les Lada sont toujours là! |
Ensuite, les champs de coton font place à de très belles montagnes
désertiques. Nous qui pensions que l'Ouzbékistan était plat...
Une nuit, nous campons au milieu de ce beau paysage, non loin de la
route. Étienne dort très mal parce qu'il est réveillé par les phares des
camions qui passent. À 5h du matin, petit stress : un mec sort de son véhicule...
à quelques mètres seulement de nous. Heureusement, il ne fait que passer un
coup de fil.
Le lendemain matin, une troupe de vautours rôdent à proximité : il y a
une dépouille de renard sur la route. Étienne est fou de joie! Mais il faut
avancer : aujourd'hui nous devons absolument rejoindre un hôtel, car voilà déjà
3 jours que nous sommes entrés dans le pays, et il est obligatoire de
s'enregistrer dans un hôtel toutes les 3 nuits. Sauf que... le prochain hôtel
se trouve à 110km, et nous sommes en montagne!
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Une nouvelle découverte culinaire : le kaki! Encore vert, il a le goût de poire |
La journée est dure : nous enchaînons les cols et les zones en travaux. À
18h, alors que la lumière commence à baisser, nous sommes encore à plus de 30km
de l'hôtel. Quelques tartines de choco nous redonnent du courage... et,
finalement, nous arrivons en pleine nuit, crevés. Nous trouvons l'hôtel. Et
tombons nez à nez avec la grille des prix : 55$ la chambre! Oh oh... Finalement, à force de discuter,
nous réalisons qu'en payant en monnaie locale (le sum), le prix baisse à 25$.
En fait, on l'apprendra quelque temps plus tard, en Ouzbékistan le taux de
change officiel est beaucoup plus bas que le taux pratiqué dans la rue ou dans
les magasins. Il ne faut donc jamais échanger de l'argent dans une banque, ou
payer en dollars!
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Bon, il arrive ce bus...? |
Le lendemain, c'est notre anniversaire de
voyage : voilà un an que nous sommes partis de Bruxelles! Ca passe vite, et en
même temps, le départ, Singapour, la Malaisie... tout ça nous paraît si loin.
Tant de rencontres et d'images nous en séparent. Des souvenirs que nous
commençons d'ailleurs parfois à mélanger. Après un an sur les routes, il nous
semble aussi que notre façon de voyager a un peu évolué : nous sommes plus
confiants et moins en attente. On ne cherche plus à "rentabiliser"
notre temps, mais on est davantage à l'écoute de ce qui nous plaît le plus.
Peut-être que nous arrivons un peu mieux à profiter du moment présent, à
laisser venir les choses et à saisir les occasions imprévues... Nous avons deux
rythmes de vie bien distincts : celui de la route, et celui des villes. Ces
deux rythmes se succèdent plus ou moins régulièrement. Et d'un certain côté,
une routine de voyage s'est installée, avec ses inévitables automatismes.
Marion n'aime pas plier l'armature de la tente, Étienne n'aime pas plier les
matelas, Marion aime éplucher les légumes, Étienne aime faire les courses, Étienne
photographie, Marion rédige, Étienne gère l'argent quotidien, Marion tient les
comptes... Bref, un vrai petit train-train, finalement!
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1 an! |
Ce midi, pour fêter ça, on s'arrête dans un
restau de route. Peut-être que vous l'aurez remarqué, mais depuis quelque
temps, on n'est plus trop portés sur la
bouffe. C'est qu'en Asie centrale, la gastronomie n'est pas vraiment
intéressante. En gros, depuis le Kirghizstan, les restaurants ne proposent que
3-4 sortes de plats : les chachliks (brochettes de viande), les mantés (raviolis au
mouton), les samsas (samoussas au mouton), les lagmans (nouilles, souvent
en soupe) et le plov (riz très gras avec un peu de légumes et de ...mouton).
Et c'est tout. Et 3 fois sur 4, nous sommes malades à la sortie. Vous comprenez
donc pourquoi on préfère pic-niquer! Pourtant, ce midi, nous avons de la
chance. Les lagmans sont excellents, pas trop gras, et on nous
sert même une petite salade qui ne nous rend pas malades. Ouf!
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Cette vaisselle bleue, on la voit partout. Sur toutes les tables ouzbèkes! |
Encore un col à franchir, quelques dizaines de kilomètres sur une route
un peu barbante, et nous arrivons à Samarcande.
L'auberge est sympa, on nous offre du thé et des pastèques... et comme presque à
chaque fois, à notre arrivée, notre seule envie est de nous poser, par exemple devant
un film. Cette fois-ci, ce sera la "Folie des Grandeurs".
Notre petit séjour à Samarcande est riche
en découvertes. La visite du mausolée de Tamerlan à la tombée de la nuit nous
émerveille. Nous visitons aussi le Régistan et ses trois bâtiments, ses
minarets, sa medersa (école religieuse).
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Le mausolée de Tamerlan |
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Le Régistan |
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La nécropole Chah-e-Zindeh |
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C'est un peu comme une rue, mais chaque maison est un mausolée |
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Sur les pierre tombales sont gravés les visages des morts... c'est plus vivant |
Les monuments de Samarcande sont
grandioses. À la fois par leurs proportions et par la richesse de leurs détails
décoratifs. Une chose, pourtant, nous gêne un peu : il est impossible de
distinguer ce qui a été reconstruit de ce qui est d'origine. Difficile donc de
s'émouvoir du caractère historique du site, tout est un peu clinquant... Nous
finissons quand même par trouver, dans une salle, quelques photos des bâtiments
de Samarcande en ruine qui ont été prises par les Russes. Ce sont
d'ailleurs eux qui ont entrepris les premières restaurations (on ne sait pas très bien quand... les dates ne sont jamais indiquées!).
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Une photo de la place fin du 19ème siècle...un peu plus animé qu'aujourd'hui |
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Un bâtiment fermé au public car non encore restauré
(mais déjà consolidé avec du béton) |
Si nous avons bien admiré les monuments de
Samarcande, la vieille ville nous est restée presque inconnue : le circuit
"tourisme" est bien tracé, balisé, encadré de hauts murs. Derrière
ces murs sont cachés les vieux quartiers, et seules quelques portes permettent
d'y accéder. C'est fou de voir ça. Quant au reste de la ville, il est sans
intérêt, soviétique, moderne et sans charme.
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La rue pour les touristes : toute proprette et toute vide |
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Un porche donnant accès aux vieux quartiers |
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Blocs soviétiques décorés à l'ouzbèke! |
Nous n'avons pas le temps de rouler jusque
Boukhara, car nous avons pris trop de retard à Douchanbé en attendant notre
visa turkmène : nous décidons de prendre le train. Plutôt confortable : nous
avons droit à une séance cinéma avec des séries ouzbèkes débiles. Le contrôleur
du train a un job intéressant. Il doit augmenter et baisser le son en fonction
des moments de musique et de dialogues.
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Sortie du train |
Débarquement à Boukhara! Nous rejoignons
l'auberge Rumi, une adresse sympa à l'ambiance familiale. Le lendemain matin
nous allons faire un tour au centre culturel Isteza, et rencontrons Irina, une
femme russe qui gère l'antenne de l'association Caravansérail : une association française
qui oeuvre pour la sauvegarde du patrimoine sur la route de la soie et qui est
particulièrement active à Boukhara. Irina,
pleine d'entrain, nous fait visiter l'ancienne medersa dans laquelle se
trouve le centre culturel, nous emmène voir une ancienne medersa en
ruine, et une troisième qui a été reconvertie en hôtel.
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A droite, remarquez la petite fenêtre dans la porte pour le gardien du caravansérail! |
Contrairement à Samarcande, la vieille
ville de Boukhara est très bien conservée, et c'est agréable de s'y promener. On
se perd dans des ruelles sinueuses, entre des maisons en terre ou en brique, et
d'anciennes medersas ou d'anciens caravansérails. Faute de budget, un
grand nombre de monuments tombent en ruine un peu partout dans la ville.
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Une ruelle de Boukhara |
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Une medersa reconvertie en logements... au rez-de-chaussée, un barbier |
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Une medersa en ruine squattée par un mini-market |
Parmi tous les bâtiments visités, on
retient surtout :
- Le minaret de Kalon, campé entre une medersa
encore en activité, et une grande mosquée
- Le
mausolée des Samanides, avec ses appareillages de briques très travaillés, un petit
joyau architectural
- La mosquée avec son auvent en bois
coloré, soutenu par des troncs d'une taille impressionnante.
- Le hammam pour femmes que Marion a la
chance de pouvoir visiter. Une grotte souterraine, cachée, chaude, humide et pleine
de sensualité...!
Et voilà, nous sommes le 27 septembre, et
demain nous entrons au Turkménistan pour un contre-la-montre de 5 jours. Car le
Turkménistan n'est pas cool avec les touristes : il délivre, pour un prix
exorbitant, des visas de transit de 5 jours seulement, avec des dates fixes.
Nous devrons donc traverser le pays (500km en allant au plus court) au rythme
de 100km/jours!
À
titre d'entrainement, nous rejoignons aujourd'hui le poste-frontière, à un peu
plus de 100km de Boukhara. Le vent est dans notre dos, le relief est plat,
c'est de bon augure pour la suite...
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Alicheh a amené son guide de conversation Anglais/Ouzbek/Russe
pour pouvoir nous poser plein de questions! |
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Alicheh et Ranicheh, son petit frère |
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On est parés pour le Turkménistan! |
3 commentaires:
Je vous envie tellement...
Après votre court passage en pays turkmène, profitez bien des merveilles de l'Iran. Si vous avez besoin d'adresses à Téhéran ou à Tabriz, on en a quelques unes. N'hésitez pas.
Bisous depuis la Suisse où on espère vous accueillir quand vous y passerez!!!
C'est que vous avez même l'occasion de faire du montage vidéo ! Elle est trop top.
Au fait, je me trompe ou on dirait qu'il fait toujours magnifique chez vous ;o) ?
Continuez de profiter de la sorte !
Parvenir à faire de l'humour même au bout du bout d'une extrême fatigue, chapeau bas !!!
Magnifique périple, mais cela va sans dire. Il suffit de voir. GG
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