Carte du parcours

lundi 4 janvier 2016

Arménie : le retour de la neige et du Tigrou



Du 1er au 18 décembre 2015

L'Arménie. On en sait peu de choses, finalement, à notre passage de frontière... génocide, ex-URSS, montagnes... voilà ce que nous évoque vaguement ce petit pays.

Les montagnes, on ne peut pas les oublier : toute l'Arménie est perchée sur un haut plateau qui se dresse face à nous. Pour notre premier jour en Arménie, nous avons 2000m de dénivelé à grimper! De quoi se mettre en jambe.

On entre en Arménie le 1er décembre et la déco de Noël est déjà prête!
On découvre l'alphabet arménien, et on retrouve l'alphabet cyrillique
Avant de monter, la route traverse le village de Mehgri. Tout de suite, on se sent dans un autre monde, la Perse est déjà loin. Nous retrouvons, avec amusement,  tout plein de petits signes qui caractérisent les pays d'ex-Union soviétique. Comme les Ladas, les grillages de fenêtre en forme de soleil, les mots de russe qui nous permettent de communiquer, les blocs de logements, les hommes au crâne rasé et veste de cuir noir... et bien sûr, les immenses rayonnages de vodka dans les petits magasins!
Ça fait deux mois qu'on n'a pas avalé une seule goutte d'alcool, mais bon, on a un fameux col à passer aujourd'hui... donc la petite gougoutte ce sera pour plus tard!

Vue de Mehgri dans la brume

Ce qui change aussi beaucoup, c'est le contact avec les gens. On s'en rend compte tout de suite : plus personne ne nous hèle, plus personne ne traverse la rue pour nous serrer la main, plus personne ne nous sourit dès le premier regard. Les visages sont assez fermés, et il faut désormais que nous soyons les premiers à "casser la glace" pour établir un contact.

Nous entamons la grimpette. La pluie ne tarde pas à tomber, et réveille de puissantes odeurs de feuilles mortes et de champignons. Nous gardons le moral. Nos deux petits vélos se hissent lentement dans la brume froide et humide.

Dernier coup d’œil sur l'Iran

Puis, la pluie devient neige... la neige, ça mouille moins et c'est plus joli. Les genoux travaillent dur, car les pentes sont fortes. Ceci dit, heureusement, car dans le cas contraire il nous serait difficile de monter 2000m par une si courte journée d'hiver!

Les derniers lacets apparaissent, et nous apercevons une petite maison située juste avant le col. Et, ô miracle, de la fumée s'échappe de la cheminée! Marion est frigorifiée et fatiguée, et nous entrons nous réchauffer dès le premier signe de la main qui nous est adressé.

C'est une petite maison constituée de trois pièces en enfilade, avec un poêle au milieu, quelques lits à ressorts, une table, des murs nus, et une toilette extérieure sans porte mais avec une vue royale sur les cimes enneigées. Cinq hommes vivent ici et veillent à ce que le col reste ouvert tout l'hiver... ce soir, et toute la nuit durant, ils travaillent dur pour libérer les camions coincés. Nous, on nous offre le café, des chaises près du poêle, et un vieil homme se fait un devoir de retourner régulièrement nos gants et nos chaussures pour qu'ils sèchent bien. Au bout d'une heure, nous nous rendons compte que la nuit ne va pas tarder à tomber, nous traînons encore un peu... et l'invitation à rester pour la nuit ne se fait pas tarder. Il y a deux lits de libres, nous avons de la chance. Cela vous paraît peut-être un peu opportuniste, mais que voulez-vous, nous avons encore nos habitudes iraniennes!

Deux de nos hôtes devant la petite maison du col

Le lendemain matin, nous sommes bien reposés. Nos hôtes, eux, se sont relayés pour déblayer la piste avec bien du courage, et du café à la vodka pour se tenir chaud. Il fait merveilleusement beau, les montagnes scintillent, nous pouvons repartir. Sauf que la piste est gelée, et il faut maintenant descendre sur du verglas! On prend notre temps et on finit par arriver en bas sans trop de dégâts... Marion a quand même glissé une fois et s'en tire avec un gros bleu à la jambe, et Étienne a fait un magistral 180°, de manière à se retrouver dos à la pente, mais a réussi à se stabiliser au dernier moment!

En haut du col

Nous descendons jusque Kapan, ville de style soviétique, moche et lugubre à souhait. Le gars du cybercafé nous offre internet et des impressions, avec un grand sourire qui réchauffe quelque peu l'atmosphère du lieu. Pauvres habitants... il y a des endroits tellement déprimants que nous les traversons le plus vite possible!

En Europe ce bus serait prisé des hipsters, ici, c'est tout ce qu'il y a.
Le lac en contre-bas est en partie gelé
En été ça doit être sympa!
Souvenir d'Iran, le sirop de raisin aux graines de lin moulues
Le lendemain , nous avons affaire à une véritable tempête de neige en haut d'un deuxième col. Les flocons sont énormes, nous ne voyons pas à deux mètres. Il nous faut sans arrêt secouer les bras et les épaules pour faire tomber la neige qui s'accumule. Lorsque nous atteignons Vorotan, dans la vallée suivante, nous sommes deux glaçons rigides en quête du premier poêle venu!

Ohoh!
Ce jour-là, on ne dépasse pas Vorotan, et après avoir mangé, nous atterrissons dans l'hôtel du village. Enfin... ce n’est pas vraiment un hôtel. À côté de la cuisine familiale, un vieux couple nous installe dans une chambre chauffée au poêle. Le village enneigé est plongé dans l'obscurité, on s'éclaire à la bougie. À l'extérieur, une marmite fume sur un feu de bois : notre eau chaude pour la douche. Finalement, c'est charmant et confortable, on est contents!  
Pour le petit-déjeuner, le vieux couple nous invite à partager leur poêle. On s'installe ensemble autour de la table, sous la lueur de la bougie et les premiers rayons de soleil. Nous partageons le repas, et nos compagnons testent avec curiosité le porridge au raisin. De notre côté, le challenge est de taille : nous devons vider un bol entier de Rash : une soupe au pain, aux tripes, et au gras (la vache a été tuée il y a quelques jours), accompagnée d'ail cru, d'un bouquet d'estragon, et de vodka. Attention, pas n'importe quelle vodka, s'il-vous plaît! Il s'agit de vodka MAISON, pas de la petite bibine à 40° qu'on trouve dans le commerce... non! Ça, c'est de la 70°! Voilà ce que nous explique avec entrain notre grand-père, qui s'enfile stoïquement trois verres pour bien commencer la journée. Nous, on n’en revient pas... et on refuse poliment de le suivre. Dans ces cas-là, le vélo est une très bonne excuse, tout le monde comprend qu'on ne peut pas tenir sur le vélo en ayant bu de la vodka. Alors, le grand-père nous amène de "l'eau", c'est à dire du  vin maison... la plus horrible piquette de notre vie!

Étienne qui lit le journal la carte routière
Le boiler de l'hôtel
Vous prendrez bien une petite goutte?

C'est donc avec le sourire, l'haleine puissante et le ventre chaud que nous quittons Vorotan. Le soleil est revenu, et nous espérons que la glace sera rapidement fondue. Erreur! Ici, lorsqu'il neige, la neige se tasse et devient glace, rien ne fond à -10°C! Goris ne se trouve qu'à une douzaine de kilomètres, plus haut sur la montagne... mais il nous faudra la matinée pour y arriver, car nous sommes obligés de pousser les vélos la plupart du temps. Les voitures, elles, sont habituées au verglas, et nous les voyons nous doubler avec des roues arrière qui dévient de manière impressionnante... mais le conducteur, confiant, reprend le contrôle et continue sa route tranquillement!


La route scintille sous le soleil, les pentes sont recouvertes d'un épais manteau blanc, les moineaux sifflent doucement, c'est beau. Mais c'est dur. Goris, enfin. Nous faisons quelques courses en espérant pouvoir continuer à rouler sur une route dégagée. Mais dès la sortie de la ville, on s'aperçoit que la route est impraticable. Même les voitures réfléchissent à deux fois avant de s'y engager, et on en voit certaines qui patinent laborieusement. Il nous faut revoir nos plans.

Notre cher ami Tigrou nous rejoint demain soir, avec son beau vélo rouge, et nous, on est coincés à Goris...!!!! On avait prévu de pédaler avec lui sur un plateau à 2000m d'altitude... et ben ça va pas être possible. La météo nous promet un ciel bleu pour toute la prochaine semaine, mais des températures qui ne permettront pas à la glace de fondre de si tôt.

Nous décidons de tenter de rejoindre Yerevan (la capitale) en stop-camion, mais les camionneurs semblent bien trop concentrés sur le verglas pour nous remarquer au bord de la route. Heureusement, en fin de journée, nous rencontrons un homme qui parle anglais (fait assez exceptionnel en province arménienne), et qui a un ami partant à Yerevan le lendemain à l'aube, pour livrer des sacs de céréales. Il peut nous emmener pour un bas prix. Tout s'arrange. Nous réussissons à joindre Tigrou pour le mettre au courant. À 6 heures du matin nous embarquons, à 8 heures le soleil pointe le bout de son nez au-dessus de la neige, et nous évoluons dans un paysage de livre d'enfant, aux couleurs pastels. À 9h, notre gentil chauffeur nous offre le café.

Comme beaucoup d'Arméniens, il nous explique que plusieurs membres de sa famille vivent à l'étranger. Lui a une soeur en Allemagne, l'autre aux États-Unis. Les multiples massacres et le génocide commis par les Turcs, ainsi que la chute de l'URSS, ont dispersé la population arménienne à travers l'Europe et l'Amérique. Nous apprenons que la diaspora arménienne est plus importante numériquement que la population d'Arménie (les chiffres varient beaucoup... selon Courrier International, elle serait trois fois plus importante).

Vous saviez que Charles Aznavour est arménien? Son nom arménien
 c'est Շահնուր Վաղինակ Ազնաւուրեան (Chahnour Vaghinag 
Aznavourian)
Lorsque nous entamons la descente dans la vallée de l'Araxe (nous l'avions quittée en entrant dans le pays), la vue est splendide: face à nous se dresse le majestueux mont Ararat. Un volcan aux neiges éternelles qui, du haut de ses 5165m, surplombe de loin tout ce qui l'entoure (Yerevan se trouve à 900-1000m d'altitude seulement). On comprend pourquoi il est si connu et si admiré, ce volcan. Et puis, c'est aussi sur ce sommet qu'aurait accosté l'Arche de Noé, après le Déluge... Malheureusement pour les Arméniens, le mont Ararat se trouve maintenant en Turquie. Enfin, au moins, d'ici, on en a une jolie vue.

À Yerevan, on se trouve donc un petit nid douillet pour passer la semaine et accueillir Tigrou qui arrive de Belgique par avion!!!

En Arménie, le chech du Kirghizstan se fait remplacer par le bonnet!
Nous passons la semaine à découvrir Yerevan et sa région, en alternant balades et visites dans la ville, et virées à vélo à la découverte des vieilles églises aux alentours.

On dirait que Yerevan, la capitale de l'Arménie, n'a pas encore beaucoup évolué depuis la fin de l'Union soviétique... mis à part la rue piétonne et les nouveaux magasins/cafés/restos branchés, elle reste principalement constituée de longues avenues perpendiculaires, d'imposants monuments soviétiques, et de quelques places monumentales. Bref, on ne lui a pas trouvé beaucoup de charme. Par contre, on a bien aimé : 

- contourner le chantier abandonné avec vue sur la ville,
- observer les avions russes dans le parc de la Victoire (pour Étienne),
- retrouver le goût du vin chaud au petit marché de Noël,
- assister à l'opéra de Carmen chanté en français avec accent russe (belle mise en scène),
- apprendre l'histoire du génocide arménien au musée du génocide (nous n'en savions presque rien),
- écouter les aventures de certains livres anciens au musée des manuscrits,
- admirer des trésors datant de l'âge du bronze au musée national
Nous avons vraiment été épatés par la qualité des musées à Yerevan, la compétence de nos guides, la richesse des collections.

Le musée cascade
Tigrou et Marion en plein débat sur l'interprétation possible de cette forme
En haut, le musée n'est pas fini, et ça fait un bout de temps
Cette station de téléphérique est abandonnée depuis la fin de l'URSS
Marché de Noël = vin chaud
L'église orthodoxe de Saint Grégoire, et l'Opéra
Ce tunnel piétonnier est une ancienne ligne de chemin de fer
Le mémorial du génocide

Et puis de temps en temps, on prend nos vélos par les cornes, et on va donner quelques tours de roue sur les collines autour de Yerevan.

- à 20km à l'ouest de Yerevan : les ruines de la cathédrale de Zvartnots (7e s.), et Echmiadzin, la ville où se trouve le siège de l'Église apostolique arménienne.

Zvartnots, avant
Zvartnots, maintenant
"Mon petit bonheur communiste!" : réplique de Tigrou dès que l'on croise 
des éléments datant de l'URSS et ayant pour but de divertir la population
 

- à 40km au sud de Yerevan : le monastère de Khor Virap (7e– 13es.), situé à quelques centaines de mètres de la frontière turque, et qui fait face au mont Ararat. Bon, le mont Ararat, on ne le voit pas bien à cause d'une brume épaisse qui s'est installée depuis plusieurs jours dans la vallée... dommage. Mais le monastère est joli, et il a une histoire rigolote : c'est ici que Grigor (saint Grégoire l'Illuminateur), fut jeté aux oubliettes par un roi d'Arménie qui persécutait les chrétiens, au IIIe siècle. Mais Grigor survécut miraculeusement au fond de sa fosse, durant 13 ans. Un jour, le roi, après avoir persécuté et sainte Gayané et sainte Hripsimé, tombe malade et se transforme en sanglier. C'est alors que Grigor apparait comme le seul capable de le soigner. Il guérit le roi et le converti au christianisme par la même occasion : en cette année 301, l'Arménie est le premier pays au monde à devenir officiellement chrétien, et saint Grégoire l'Illuminateur devient le premier catholicos de l'Église apostolique arménienne.

Sur la route de Khor Virap, à Artashat : l'association subtile 
d'une église apostolique et de blocs soviétiques
Jeux de lumières à Artashat
Le monastère de Khor Virap, et le mont Ararat dans la brume
La frontière turque, c'est la ligne de barbelés qu'on voit en arrière-plan

- à 40km à l'ouest de Yerevan : le monastère de Geghard, construit à flanc de montagne, au pied de rochers en à-pic. Ce qui est intéressant, c'est que la moitié du monastère est creusée dans la roche. L'atmosphère du lieu est vraiment particulière. Les salles sont grandes et froides, les parois sont massives, une source d'eau jaillit de l'ombre, les couleurs n'existent plus.
Autour du monastère, dans les falaises, il y a toute une série de petites grottes creusées dans la roche : ce sont les grottes des moines-ermites. Incroyable. Ils vivaient là, dans ces petits trous surplombant le monastère, exposés aux vents et au froid.

L'atmosphère qui règne dans ce monastère avait quelques chose de fantastique
Les salles 4, 6, 7 et 10 sont creusées dans la roche
Les Khatchkar (littéralement pierre à croix) sont une spécificité 
de l'art arménien, on les trouve partout, incrustées dans les murs, 
sous forme de stèles ou gravées dans la roche
La grenade symbolise la fécondité (sur le haut de la coupole)


Ces grottes servaient de lieu de retraite pour des moines-ermites
Ce gavit est entièrement creusé dans la roche
Mes biens chers frères, mes biens chères sœurs,...
Sur le chemin du retour nous visitons le site de Garni, 
ce temple a été reconstruit avec un grand nombre de pierre 
d'origine et est dédié à Mithra, il date du 1er siècle Ap.J-C

- à 90km au nord (là, on y va en voiture, par crainte du gel) : le monastère de Sevanavank, perché sur une presqu'île du lac Sevan, à 1900m d'altitude. Alors que Yerevan est plongé dans le brouillard, ici, le lac est balayé par les vents et baigné de soleil. Le monastère, stoïque, campe sur ce bout de terre glacée, comme un iceberg au milieu des eaux.

On est quand même bien content de ne pas devoir camper ici
Encore un khatchkar

C'était notre dernière visite avec Tigrou... il s'envole déjà pour Bruxelles. Mais ce n'est qu'un petit au revoir, car nous ne sommes plus si loin du but! Dans un peu plus de six mois, nous serons de retour!

Pour l'instant, nous rédigeons le blog, faisons une dernière lessive, chargeons les vélos, et nous reprenons la route... vers la Géorgie. La Géorgie, c'est en fait le seul pays où nous pouvons aller, maintenant.

Car l'Arménie est en guerre avec l'Azerbaïdjan depuis la chute de l'URSS, et les deux pays se disputent toujours la région du Haut-Karabagh. Toutes les frontières sont également fermées entre l'Arménie et la Turquie, dont les relations sont ultra-tendues, notamment à cause de la question du génocide. Côté iranien, ça va un peu mieux depuis quelques années, et les échanges économiques et énergétiques commencent à se développer. Mais au nord, côté géorgien, c'est aussi assez compliqué, car, en raison de la deuxième guerre d'Ossétie du Sud entre la Géorgie et la Russie, le principal partenaire économique et stratégique de l'Arménie, des problèmes de transit de marchandises ont lieu à cause de la fermeture partielle des frontières russo-géorgiennes. Bref, en gros, l'Arménie est très isolée et on comprend un peu mieux pourquoi le pays n'arrive pas à "décoller" depuis 1991, la chute de l'Union soviétique et son indépendance.

En route pour la Géorgie, donc. Nous devons de nouveau monter sur un plateau à 2100m, et on redoute un peu de se faire de nouveau bloquer par la glace. Mais tout se passe bien. Sur le plateau il y a beaucoup de neige, mais la route a été dégagée et nous pouvons rouler sans soucis. Par contre il fait très froid! Cette nuit-là, nous avons dormi à -15°C environ... l'eau a gelé dès 19h. On a dû sortir toutes les couches possibles et imaginables pour réussir à dormir, même la couverture de survie!

Là, on a eu froid!

Le lendemain soir, nous rencontrons un grand chien sur le bord de la route, manifestement abandonné. Il fait un peu peur au début, car ses anciens maîtres lui ont coupé les oreilles, et il est affreusement maigre... mais gentil comme tout, en quête d'affection et de contacts humains. Nous avons adopté Grigor le temps d'une nuit.

Grigor dans la tente, le ventre un petit peu mieux rempli

La route redescend pendant 3 jours, maintenant : nous quittons le haut plateau arménien et allons retrouver un peu plus de chaleur en Géorgie. Avant la frontière, nous faisons halte dans la ville d'Alaverdi.

De toutes les petites villes arméniennes par lesquelles nous sommes passées... Alaverdi est la plus glauque. Coincée dans le fond d'une vallée étroite, elle est composée de blocs soviétiques en ruine qui se succèdent sans aucune fantaisie. Pas une petite placette, pas un restaurant, pas même un petit café (pour nous réchauffer, nous sommes obligés de pic-niquer dans le supermarché). Alaverdi est triste, et ses habitants n'ont pas l'air très heureux. Le taux de chômage est énorme, les gens restent chez eux. L'immense usine sidérurgique qui occupe une bonne partie de la ville est à moitié abandonnée, mais elle crache encore une épaisse fumée qui s'accumule devant les montagnes. Aujourd'hui cette fumée est lâchée plus haut dans la montagne, au moyen d'un long tuyau. Mais il y a quelques années, la fumée sortait de la cheminée, et engendrait des pluies acides qui trouaient les vêtements des gens...! Nous prenons le vieux téléphérique pour nous rendre au monastère qui se trouve en haut de la falaise. De voir toute cette tristesse en bas, ça donne les larmes aux yeux. Le soir, nous logeons chez Aram, un couchsurfer de Yerevan qui travaille ici, dans une association qui aide les jeunes d'Alaverdi au niveau social et éducatif. Mais Aram est un peu déprimé par l'endroit et souhaiterait travailler ailleurs ou venir voyager en Europe (mais toutes ses demandes de visas ont été refusées). Bon. Ça ne nous aide pas à avoir une vision plus positive d'Alaverdi.

Le téléphérique est encore utilisé comme un transport en commun classique.
 Il relie Alaverdi à Sanahin
Peut-être la ville la plus triste que nous avons croisée

Le point positif, ce sont les deux monastères que nous visitons dans le coin. Le monastère de Sanahin (au-dessus d'Alaverdi) et le monastère de Haghpat. Deux petites merveilles classées au patrimoine mondial de l'UNESCO, perchées sur des plateaux herbeux qui dominent la rivière, en contrebas des falaises. Un paysage étonnant.
Du monastère d'Haghpat, on peut voir celui de Sanahin sur le plateau voisin
Il a intérêt à être beau ce monastère!

Les deux monastères nous plaisent bien, il y a vraiment une ambiance étrange dans ces vieilles églises  arméniennes... imaginez de fragiles petites flammes entourées de grosses pierres humides et froides, des odeurs de mousse et de neige, beaucoup d'obscurité et, au centre, un pilier de lumière blanche qui tombe du ciel.
Le monastère de Sanahin
Dans tout le monastère, le sol est composé de pierres tombales
Le monastère d'Haghpat
Chaque rond de terre-cuite couronne une amphore de plus de 1000 litres
servant à stocker le vin
Nos derniers kilomètres en Arménie
Dans les restaurants de route en Arménie, on nous installe souvent dans
 une pièce privée avec rideau et verrou sur la porte pour garantir notre intimité!
Petit extrait du régime équilibré du cycliste en Arménie: ce midi, c'est
brochette enveloppée de lavach avec frite et pain! Pas vraiment le choix...
Dernier camping en Arménie, on espère qu'il fera
 plus chaud en Géorgie!
Voici la vidéo, on a pas pu faire plus court :

L'Arménie, c'est fini, nous voici en Géorgie! Ce matin nous passons la frontière. Jamais encore le passage de frontière ne fut si facile et si rapide, un vrai bonheur! Il fait beau, il fait plus chaud, les montagnes sont derrière nous et le paysage s'ouvre sur de grandes étendues brunes, sillonnées par les vignes. Dans un jour, nous sommes à Tbilissi, et dans une semaine, nous avons de nouveau de la visite!!!


3 commentaires:

Yann a dit…

Toujours autant de plaisir à suivre votre voyage !
L'hiver donne énormement de cachet aux photos !
Bonne route en Georgie puis probablement en Turquie.

Djédjé a dit…


Beauté sauvage et primaire mais quelle dureté, quelle souffrance !
Chapeau bas pour cette incroyable endurance.
Frissons garantis en visionnant ces petits moments que vous nous faites partager.
Peu d'entre nous ont le courage et l'abnégation d'aller aussi loin dans l'authenticité de la vie la plus simple, au plus près des éléments. Un vrai retour à nos origines ! Quel défi ! Que d'émotions !
Et vous le relevez admirablement...
Grandes félicitations.
Et vive les rivages plus hospitaliers de la Mer Noire et de la Mer Méditerranée !

Nadezda a dit…

Ravie d'avoir découvert votre blog. Vous êtes courageux, quelle magnifique expérience.